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PARTIE II

Enjeux d’une intense implication personnelle :


La manière dont la santé mentale des cinéastes et acteurs peut être mise à contribution ou affectée par leurs métiers

La relation indéniable entre santé mentale et cinéma ne s’arrête pas aux fictions concernées par ce sujet. En effet, il arrive parfois que la réalité rattrape la fiction et que les personnes exerçant dans le monde du cinéma (notamment les réalisateurs et les acteurs) voient leur santé mentale affectée par une expérience de tournage, ou au contraire que l’idée d’un film voie le jour du fait de la relation déjà préexistante que ces personnes entretiennent avec leurs éventuels troubles mentaux. Dans ce dernier cas, le film va alors servir de catharsis aux maladies psychiques qui affectent certains réalisateurs, leur permettant d’exprimer ce qui habite leur inconscient, de libérer la parole autour d’une pathologie, ou encore de mieux comprendre les enjeux de leur maladie, dans leur relation à eux-même et aux autres.


Par ailleurs, certaines études ont particulièrement bien démontré le lien qui existe entre créativité artistique et troubles mentaux :


Par exemple, il a été avancé qu'il existerait un lien particulier entre la créativité et le trouble bipolaire. Des scientifiques ont également constaté une surreprésentation du trouble dépressif majeur chez les dramaturges, romanciers, biographes, et artistes.


Les chercheurs affirment que les comédiens seraient plus enclins à développer des troubles du comportement psychotiques et qu'ils seraient plus à même d'être bipolaire que la moyenne, ce qui favoriserait aussi le développement de leur talent d'artiste. On dit d’ailleurs des individus psychotiques qu'ils témoignent d'une capacité de voir le monde d'une façon novatrice et originale, littéralement, de voir ou de ressentir des choses que les autres ne peuvent pas appréhender.


Pour parvenir à cette conclusion et montrer que les acteurs présenteraient une sorte de « forme saine » de psychose, les chercheurs de l'Université d'Oxford ont demandé à 523 comédiens (404 hommes et 119 femmes) du Royaume-Uni, des États-Unis et d'Australie de remplir un questionnaire destiné à mesurer les traits psychotiques présents chez les personnes saines.


Quatre aspects ont particulièrement été mesurés :


  • Le goût pour les expériences inhabituelles (télépathie et croyance dans les événements paranormaux)

  • La désorganisation cognitive (distraction, difficulté à se concentrer)

  • L’introversion (réduction de la capacité à ressentir le plaisir social)

  • Le comportement impulsif (tendance à un comportement impulsif et extraverti)


Ce questionnaire a également été rempli par un groupe de personnes n'ayant pas un métier créatif. Les chercheurs britanniques se sont alors rendu compte que les acteurs ont des scores plus élevés dans chacun des quatre types de personnalité psychotique que les personnes exerçant une activité non-artistique.

Selon le journal britannique The Independent qui relaye cette étude, psychologues et psychiatres tendent donc de plus en plus à montrer que la folie et la créativité sont étroitement corrélées. Gordon Claridge, professeur au Département de psychologie expérimentale de l'Université d’Oxford, qui a coordonné cette recherche, nuance toutefois en précisant : « tous les comédiens ne sont pas concernés par ce constat, mais la tendance semble montrer que ces personnes ont un trait en commun », à savoir être sujet à certaines névroses qui paradoxalement les rendrait capable de mieux s’approprier leurs rôles.

« Les éléments créatifs nécessaires pour être acteur et faire de l'humour sont très semblables à ceux qui caractérisent la signature cognitive des personnes souffrant de schizophrénie ou de trouble bipolaire »

-   Professeur Gordon Claridge, pour la revue Journal of Psychiatry


Les résultats montrent notamment que les humoristes sortent du lot de par leur personnalité généralement plus introvertie que la moyenne des acteurs. Cela expliquerait également un rapport différent à leur public. Récemment, l'acteur belge Benoît Poelvoorde, figure française reconnue du cinéma, a d'ailleurs évoqué publiquement sa bipolarité, à l’instar d’acteurs américains comme Jim Carrey ou encore Ben Stiller. Les deux premiers ont même été internés en hôpital psychiatrique pour soigner leurs troubles. Le succès rencontré par leurs performances respectives auprès du public, régulièrement saluées par les critiques, pourrait donc s’expliquer selon cette étude par leur bipolarité.



Tout l’intérêt de cette problématique est donc de démontrer et expliquer l’influence réciproque qu’exercent cinéma et santé mentale l’un sur l’autre, notamment chez les comédien.ne.s à travers les préparations intenses qu’ils s’imposent pour certaines rôles, et chez les réalisateurs, à travers l’exploration de leur propre inconscient à laquelle ils ont parfois recours pour réaliser leurs films (A).


Illustrant cette double influence à merveille, l’incarnation du personnage du Joker au cinéma a toujours constitué un immense rôle de composition ayant eu un impact très marquant sur la santé mentale de ses différents interprètes, notamment Heath Leger et Joaquin Phoenix (B).

Partie II: Texte

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